ESSAIS DE REPRODUCTION ARTIFICIELLE DU DIAMANT | FR
Après que les chimistes eurent découvert que le diamant n'était que du charbon cristallisé, on essaya de répéter dans les laboratoires le travail de la nature. Il ne sera cependant pas sans intérêt de suivre ces travaux que nous raconte e. a. Henri Jacobs en 1880.
Il faut le dire, les chercheurs n'ont pas été inspirés seulement par les bénéfices énormes qu'une heureuse réussite pourrait procurer, mais bien plutôt par ce désir de connaître qui retenait les savants dans la solitude de leurs laboratoires, fin du 19e siècle. Autant il y a eu de théories sur la formation du diamant, autant on a imaginé de procédés pour arriver à sa production artificielle. Il ne se passa pas l'année sans que l'Académie des Sciences ne recevait des recettes pour la fabrication de cette précieuse gemme.
Un livre édité en 1724 à Rouen intitulé « Les secrets concernant les arts et métiers » comporte une recette tout à fait étonnante pour faire des diamants : Il faut prendre de la farine d'orge criblée pour en faire une pâte dure avec de l'huile de pétrole; on coupe par le milieu pour y introduire des cristaux de roche, en veillant à ce que les pierres ne se touchent pas; le «gâteau» est recouvert de pâte et mis au «Four de Roue» pendant 4 à 5 heures, en augmentant la température toutes les 2 heures ; on obtient alors une masse de pierres qui étincellent comme le diamant. « Comme le diamant » dit le texte, parce que, bien entendu, cela n'a rien à voir avec du diamant. Ce document n'en est pas moins une des premières traces de la recherche dans la fabrication artificielle de diamant.
Becquerel a fait cristalliser plusieurs corps par des procédés électrochimiques, Despretz eut recours à un procédé semblable, et, le 5 septembre 1853, il put annoncer à l'Académie des Sciences qu'il avait obtenu du carbone cristallisé, c'est-à-dire des diamants, mais, il faut bien le dire, des diamants invisibles à l'œil nu, invisibles à la loupe même, mais présentant au microscope des pointes paraissant appartenir à des octaèdres et même quelques petits octaèdres reposant sur un sommet du fil de platine sur lequel ils s'étaient formés.
Ces microscopiques cristaux avaient été obtenus par la volatilisation lente produite dans le courant d'induction. « J'ai pris un ballon à deux tubulures, disait Despretz à l'Académie, disposé comme l'œuf électrique, à la tige inférieure j'ai attaché un cylindre de charbon pur de quelques centimètres de longueur et de 1 centimètre de diamètre, j'ai fixé à la tige supérieure une douzaine de fils fins de platine, j'ai fait le vide dans le ballon, puis, la distance des fils au charbon étant de 5 ou 6 centimètres, j'ai fait passer le courant d'induction de l'appareil construit par Ruhmkorff. L'arc était rougeâtre du charbon à une faible distance du platine, la partie qui enveloppait l'extrémité des fils de platine était d'un bleu violet.
« L'appareil a toujours été maintenu dans cette disposition. Nous avons mis en haut le faisceau de platine afin de n'avoir pas à confondre de petits éclats » de charbon avec les cristaux qui pourraient se former, la pile se composait de quatre éléments de Daniell réunis deux à deux. « L'expérience a duré plus d'un mois sans interruption, sauf le temps nécessaire pour recharger la pile. Il «'est posé une légère couche noire de charbon sur le fil. » Quelques-uns de ces cristaux furent remis à Gaudin, lapidaire, pour qu'il les essayât à la taille des pierres dures. Sa conclusion était ; « Dès que j'ai été en possession du petit fil de platine, long d'un centimètre, mis de côté par vous, comme chargé d'un grand nombre de cristaux microscopiques de forme octaédrique, j'ai ratissé ce fil avec le plus grand soin, sur le milieu de mon plan en cristal de roche, après avoir poli trois rubis fixés avec la gomme-laque j’ai reconnu aussitôt un travail franc, tout à fait semblable à celui de la poudre de diamant ».
« Au bout de quelques minutes, toutes les saillies étaient nivelées, les rubis présentaient, en un mot, une surface parfaitement plane et brillante, telle que je ne l'ai jamais obtenue qu'avec de la poudre de diamant. » Nous sommes persuadés, ajoute Chatrian, que les produits obtenus par Despretz sont des diamants, mais ceci n’est pas une preuve irréfutable seulement par le fait qu'ils ont pu polir des rubis ; on sait en effet que les lapidaires taillent le corindon avec de l‘égrisé ou de la poussière de diamant, mais aussi avec de l'émeri, ce qui ne veut pas dire que celui-ci soit plus dur ou même aussi dur que le rubis.
D'autres ont essayé l'étincelle électrique sur un mélange de gaz acide carbonique et d'hydrogène. Aux États-Unis, un professeur de chimie aurait obtenu de petits cristaux, toujours microscopiques, en chauffant de la plombagine au chalumeau à gaz hydro-oxygéné. Tels sont les résultats obtenus par la fusion, la volatilisation et le procédé électrochimique. Les produits obtenus par Despretz étaient certes encourageants et même concluants pour la science, mais ils sont sans valeur considérés au point de vue commercial.
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